fermer
revenir au site   >

Jeux vidéo : le risque auditif existe-t-il ?

Actualités

11.03.25

image bannière

1 joueur sur 2 victime de troubles auditifs suite à session avec son. Parmi eux 36% des joueurs déclarent une plus forte sensibilité au bruit suite à une session de jeu et 35% indiquent avoir fait l’expérience de sifflements - bourdonnement à l’issue d’une session avec son. 23% ont fair l’expérience du perte auditive momentanée

Inédit en France, l’Association Nationale de l’Audition révèle un état des lieux concret des risques auditifs liés à cette pratique. Avec 38 millions de Français qui s’adonnent aux jeux vidéo, il était naturel de se questionner sur l’existence de vécus de troubles de l’audition. Ces pratiques de loisirs touchent indifféremment tous les âges et toutes les conditions sociales. On joue en famille, seuls mais aussi en ligne. L’enquête réalisée avec l’institut Ifop est une première en France. Une nouvelle fois, les résultats obtenus donnent le poids de l’ampleur des troubles auditifs causés par les comportements d’exposition aux sons, troubles irréversibles, aux demeurants évitables et annonciateurs de surdités précoces. Cette enquête apporte les arguments à la nécessité d’une politique active de prévention primaire en France impulsée par les pouvoirs publics. Une nouvelle enquête de référence à retrouver dans la base de données de l’Association. Depuis sa création en 1996, l’association enrichit les données comportementales, sanitaires et économiques dans le cadre de sa mission d’observatoire de l’audition. 

JEUX VIDÉO ET SANTÉ AUDITIVE, UN RISQUE SOUS-ESTIMÉ DANS UN DÉBAT ÉMERGENT

Premier constat, les problématiques de santé auditive inquiètent modérément les Français âgés de 15 ans et plus, alors même qu’ils sont nombreux à témoigner être touchés personnellement par une gêne auditive. 35% de la population se déclare préoccupée, alors même que 79% des Français rencontrent des situations de gêne auditive, dont 26% régulièrement.
Les Français établissent difficilement un lien entre jeu vidéo et pratique à risque pour l’audition. En effet, ils reconnaissent plus volontiers que certaines activités, comme se rendre en boîte de nuit (83%) ou en concert (77%), ou encore la pratique de sports mécaniques (71%) peuvent être à risque. Le constat est plus en demi-teinte concernant les jeux vidéo : 41% estiment qu’il peut constituer une pratique à risque pour l’audition. Difficile pour les joueurs eux-mêmes d’identifier le risque auditif des jeux vidéo (40% des joueurs utilisant le son le perçoivent comme tel), alors même que le sujet de l’audition préoccupe davantage cette population (39% se disent préoccupés, +9pts vs la moyenne). Plus précisément, les joueurs avec son n’ont pas conscience d’être directement concernés : seuls 17% estiment que leur pratique personnelle présente un risque pour leur audition. 

LES TROUBLES AUDITIFS CONSTATÉS CHEZ UN JOUEUR SUR DEUX

Comme pour l’audition en général, un écart persiste entre la prise de conscience encore perfectible de cet enjeu et un vécu assez généralisé des problématiques d’audition. En effet, ces problématiques d’audition sont déjà une réalité pour la moitié des joueurs : 50% des joueurs témoignent avoir vécu une situation de gêne auditive à la suite d’une session de jeu avec son, et 31% régulièrement ou de temps en temps.
Plus précisément, près d’un joueur jouant avec l’audio actif sur cinq affirme expérimenter au moins de temps en temps la sensation que ses oreilles sont bouchées (19%), des difficultés à entendre les sons faibles (17%). 19% des répondants ont souffert d’une hyperacousie, un phénomène qui touche davantage les plus jeunes (18% des 25-34 ans contre 12% de la population française, selon la troisième vague du baromètre « Les Français et le phénomène des acouphènes et de l'hyperacousie » en 2024). Enfin, 18% déclarent avoir expérimenté au moins de temps en temps des bourdonnements, 12% une perte d’audition temporaire. 

Les personnes les plus touchées sont celles qui jouent plus de deux heures par session (43% rencontrent régulièrement une gêne auditive), celles dont le volume moyen dépasse les seuils recommandés (68%), et celles dont le volume maximal excède 7 sur 10 (61%). A noter que même lorsque le volume moyen déclaré est plus modéré, les joueurs expérimentent des situations de gêne auditive (24% pour ceux dont le volume ne dépasse pas 4 sur 10, et 37% pour ceux dont le volume est compris entre 5 et 6). 

MIEUX CERNER LES HABITUDES DES JOUEURS

Il est intéressant d’examiner les conditions dans lesquelles les joueurs pratiquent leur activité. Une minorité rapporte un niveau de pratique intense, qui peut contribuer à fragiliser davantage leur santé auditive. Les personnes jouant avec le volume activé passent en moyenne 2h02 par session, dont 18% trois heures ou plus. Selon les joueurs eux-mêmes, le volume sonore moyen se situe à un niveau modéré, de 4,3 sur 10, avec 12% qui affirment qu’il se situe entre 7 et 10, soit au-dessus des seuils recommandés. Au maximum, le volume sonore atteint 5,8 sur 10, mais 39% des répondants témoignent qu’il monte à 7 sur 10 ou plus. 

DES EFFORTS DE PRÉVENTION, ENCORE TROP LIMITÉS

La prévention s’installe timidement dans les habitudes des joueurs utilisant le son. 45% mettent régulièrement en place au moins une mesure de prévention, mais seulement 14% en appliquent trois ou plus.

La perception d’un manque d’utilité est le principal frein cité à la mise en place de mesures de prévention (85% le mentionnent). L’impact négatif sur l’expérience de jeu arrive en second, cité par 24% des répondants. Pour les joueurs les plus directement touchés, c’est-à-dire ceux qui rencontrent des problématiques auditives liées aux jeux vidéo, ce frein ressort significativement plus : 43% le mentionnent. Les joueurs se montrent plutôt intéressés par des fonctionnalités permettant un meilleur contrôle du volume sonore, plutôt que par des messages de prévention.

  • Les dispositifs offrant un contrôle plus fin du niveau sonore suscitent davantage d’adhésion : 67% se verraient utiliser une fonctionnalité pour ajuster le niveau sonore des différents éléments pris isolément, et 64% une diminution automatique du volume lorsque le risque est avéré.
  • Néanmoins, les différents messages de prévention séduisent une majorité de joueurs : 58% seraient intéressés par des messages d’alertes appelant à baisser le volume, 56% pour un récapitulatif de leur niveau sonore et des risques encourus, 53% par des messages incitant à faire des pauses et 51% par des messages de prévention au lancement du jeu.
  • On observe cependant qu’une proportion non négligeable s’oppose à ces dispositifs : entre 21% et 30% déclarent qu’ils ne les utiliseraient pas du tout s’ils y avaient accès.

LES SPECIFICITES DES JOUEURS TOUCHES PAR DES PROBLEMATIQUES DE SANTE AUDITIVE

Bien que préoccupé par sa santé auditive (56%, vs 35% en moyenne), le joueur ou la joueuse touché.e par des problématiques d’audition liées aux jeux vidéo joue sur différents supports avec une moyenne de 2h20 par session, et à sons plus élevés (4,7 en moyenne, contre 3,9 chez ceux qui n’en expérimentent aucune). Ce sont des joueurs et joueuses plus assidu.e.s dans tous les genres de jeux proposés, marquant un investissement particulier dans ce loisir.
Bien qu’il ou elle semble plus conscient.e des risques auditifs liés à l’expérience de jeu avec son, cela reste assez éloigné de sa réalité (29% seulement, contre 16% en moyenne). Il ou elle est beaucoup plus enclin.e à appliquer les mesures de prévention, particulièrement le fait de couper le son de certaines fonctionnalités, ou encore l’utilisation d’écouteurs ou de casques à réduction de bruit, parmi d’autres.
Si l’absence de nécessité demeure le principal frein à la mise en place de prévention, la réduction des émotions liée à l’expérience du jeu gagne notablement en importance, mentionnée par 43% des concerné.e.s, contre 24% en moyenne).

UN PROFIL TYPE DE JOUEUR A RISQUE ELEVE DE TROUBLES AUDITIFS EMERGE

Si la moyenne d’âge des joueurs est de 39 ans en France, un profil type du joueur type le plus exposé aux risques auditifs apparaît au travers de cette enquête. Le joueur ou la joueuse, car il s’agit d’une activité non genrée. Le profil type est âgé de moins de 35 ans et se situe plus particulièrement dans la classe d’âge 18 à 24 ans. S’ils ne semblent pas encore particulièrement frappés par des problématiques d’audition liées au jeu vidéo, ils ont déjà une santé auditive atteinte, et présentent une pratique plus à risque (durée des sessions, volume sonore…).
Les 18-24 se déclarent plus régulièrement victime de gêne auditive que la moyenne. Plus d’un tiers vivent régulièrement au moins une situation de gêne auditive (36%, contre 26% en moyenne). Plus précisément, 60% de cette classe d’âge a déjà expérimenté de l’hyperacousie, contre 44% en moyenne.
Les joueurs ayant une pratique à risque sont sur-représentés dans cette classe d’âge des 18-24, même s’ils restent minoritaires. Ainsi, 28% des joueurs âgés de 18 à 24 ans jouent trois heures ou plus par session, contre 17% en moyenne. S’ils jouent plus longtemps, le niveau sonore moyen est plus élevé que la moyenne – même s’il reste raisonnable (4,8 sur 10, contre 4,3 en moyenne). Cependant, le niveau maximal sonore déclaré est plus inquiétant : 50% déclarent jouer avec un niveau sonore maximal au-delà des seuils recommandés, contre 39% en moyenne.
42% des joueurs et joueuses de cette classe d’âge ont évoqué la survenue de symptômes d’hyperacousie ou/et d’acouphènes et 29% indiquent être au moins de temps sujets à des difficultés à entendre des sons faibles suite à une session de jeu avec son.

UNE INVITATION A UNE DEMARCHE DE PREVENTION ACTIVE DE LA PART DES POUVOIRS PUBLICS

Ce profil type milite pour une prévention des risques auditifs liés aux jeux vidéo avant 15 ans. Sachant qu’il s’agit d’une activité qui se pratique aussi en famille, l’action de prévention doit s’intégrer dès le plus jeune âge afin d’enrayer les comportement ototoxiques.
Ces pratiques de jeux vidéo viennent s’ajouter à celles de l’écoute de sons sous leurs différentes formes.
Pour qu’une telle action existe, il s’agirait que les pouvoirs publics prennent la pleine mesure de l’existence des troubles de l’audition dans l’ensemble de la population et pas uniquement chez les personnes âgées.

En l’absence de veille sanitaire, les données des surdités déclarées faussent les indicateurs permettant une prise de décision éclairée


À propos : L’Association Nationale de l’Audition (ANA), anciennement Association JNA – Journée Nationale de l’Audition, est une association loi 1901 reconnue d’intérêt général, engagée depuis 28 ans pour promouvoir l’audition comme un pilier essentiel de la santé publique .L’Association organise chaque année des campagnes nationales majeures telles que la Journée Nationale de l’Audition, la Semaine de la Santé Auditive au Travail et les Préventions Festivités de l’Été et des actions de préventions toute l’année afin de sensibiliser tous les publics aux enjeux de l’audition. Avec près de trois décennies d’expérience en prévention, l’Association agit pour : Prévenir les troubles auditifs et limiter leurs impacts sanitaires, sociaux et économiques ; Garantir un accès équitable à des soins de qualité dans le parcours de santé auditive ; Mobiliser les citoyens et les pouvoirs publics pour un changement durable en faveur de la santé auditive. Grâce à son ancrage citoyen et son expertise, l’Association constitue un acteur clé pour faire progresser la prévention et améliorer la santé auditive en France.