25.01.22
La publication du premier rapport sur la filière auditive de l’IGAS et l’IGÉSR1, ce 17 janvier 2022, constitue une étape majeure d’une période qui aura débuté le 4 avril 2014, lorsque M. Olivier Véran, à l’époque député de l'Isère, s’était déplacé au Congrès des audioprothésistes2. Ces huit années ont été marquées par un engagement fort des Pouvoirs Publics en faveur de la prise en charge des troubles de l’audition et de l’amélioration de la connaissance d’un secteur méconnu du système de santé français.
En outre, le HCFiPS recommande d’actionner impérativement le levier des politiques de prévention, lorsque des retours sur investissement positifs ont pu être chiffrés, ce qui est le cas pour les soins auditifs.
Alors que la réforme du 100 % santé est un grand succès, la mission IGAS/IGÉSR prône un tiers-payant universel effectif et alerte sur la multiplication de « publicités excessives » auxquelles il convient de mettre un terme.
Dès son introduction, le rapport IGAS/IGÉSR souligne que « les déficiences auditives constituent un enjeu de santé publique encore insuffisamment reconnu. Classées au quatrième rang des maladies par années de vie avec incapacité, leur impact sur la santé, en l’absence de prise en charge est considérable. Et les déficiences auditives représentent également un coût caché très important pour la société ».
En ce mois de janvier 2022, parait dans le Lancet3 une étude qui compile les connaissances relatives aux stratégies préventives, diagnostiques et thérapeutiques en soins auditifs, incluant notamment l’accès aux aides auditives. L’étude montre que l’investissement dans une stratégie intégrative des soins produirait des bénéfices considérables en termes d’années de vie gagnées sans incapacités (DALYs) et de productivité. Ces bénéfices surpassent largement le coût de la stratégie puisque le rendement sur investissement serait de l’ordre de quinze dollars gagnés pour un dollar investi. Une politique de santé publique volontariste devrait se traduire par le financement socialisé de cette stratégie et son inclusion dans le panier de soins, selon cette étude4.
Concomitamment, un rapport du HCFiPS5 rendu public ce 20 janvier, recommande que la prévention, lorsque des retours sur investissement positifs ont pu être chiffrés, fasse partie des « nouveaux leviers [qui] doivent impérativement être actionnés ». Le HCFiPS appelle aussi à développer les stratégies favorisant le « bien vieillir » et l’espérance de vie en bonne santé, ce qui a été démontré pour la compensation du déficit auditif6.
Dès l’instant où la réforme du 100 % santé est un grand succès, ces nouvelles données appellent à en faciliter l’adoption à nos concitoyens les plus modestes pour lesquels le tiers-payant est indispensable pour un bon accès aux soins. Comme le recommande la mission IGAS/IGÉSR, « la définition au niveau réglementaire des spécifications techniques permettant d’assurer l’effectivité du tiers payant est nécessaire » et cela sur le panier 100 % santé comme sur le panier libre7.
Enfin, la mission IGAS/IGÉSR constate que l’on « assiste depuis le 100 % Santé à une floraison de campagnes promotionnelles. Ces publicités peuvent paraître parfois excessives et ne pas servir suffisamment les objectifs de santé publique». Parallèlement, la mission remarque aussi «des indices de sur-appareillage» dus à la « possible mauvaise pratique de certains acteurs de la filière, qui auraient pu appareiller certains patients sans nécessité sanitaire avérée ».
Afin de protéger les objectifs de santé publique, les patients souvent âgés et parfois fragiles, et pour préserver également les remboursements à présent largement socialisés, le SDA soutient des mesures d’ordre réglementaire pour mettre un terme à ces « publicités excessives »8.
1 Evaluation de la filière auditive, P. Mainguy et L-C. Viossat (IGAS), avec la participation de J. Baba, stagiaire, et A. Fleges ( IGÉSR) : https://igas.gouv.fr/spip.php?article843
2 L’intervention de M. Olivier Véran au Congrès des audioprothésistes le 4 avril 2014 : https://youtu.be/mDyLwv1RyFo
3 Global return on investment and cost-effectiveness of WHO's HEAR interventions for hearing loss: a modelling study. Tordrup D, Smith R, Kamenov K, Bertram MY, Green N, Chadha S; WHO HEAR group.
Lancet Glob Health. 2022 Jan;10(1):e52-e62. doi: 10.1016/S2214-109X(21)00447-2.
4 « This is the first-ever global investment case for integrating ear and hearing care interventions in countries’ universal health coverage services. The findings show the economic benefits of investing in this compendium and provide the basis for facilitating the increase of country’s health budget for strengthening ear and hearing care services ». (Ibid.)
5 Pour des finances sociales soutenables, adaptées aux nouveaux défis, Haut Conseil du financement de la protection sociale (HCFi-PS) : https://www.strategie.gouv.fr/publications/finances-sociales-soutenables-adaptees-aux-defis-synthese
6 Prévenir la démence : l’utilisation d’aides auditives permettrait de prévenir 20 % des cas évitables (étude du Lancet) : https://www.sdaudio.org/doc/CP_SDA-Demence_rapport_Lancet-01.09.2020.pdf
7 « Recommandation n°9 Etendre l’obligation pour les OCAM du tiers payant intégral aux appareils de classe II et définir au niveau réglementaire des spécifications techniques permettant d’assurer son effectivité ». Evaluation de la filière auditive (op. cit.)
8 « L’attention de la mission a été appelée à plusieurs reprises par des ORL et des audioprothésistes sur diverses infractions : incitation à la prescription d’aides auditives à des médecins généralistes par des audioprothésistes, exercice illégal de la profession d’audioprothésiste par des assistants, des techniciens ou des opticiens, appareils de classe I vendus avec des restes à charge important moyennant la vente de suppléments non réglementaires, faible présence des audioprothésistes dans les centres, pratique déloyale ou mensongère en matière de promotion... ». Evaluation de la filière auditive (op. cit.)