30.04.23
Parti à la base d’une bonne intention (rendre les sons enregistrés plus faciles à percevoir), le son compressé s'immisce de plus en plus dans notre quotidien. Du téléphone à la télévision en passant par les visioconférences et les plateformes de streaming, il est partout. Sans entrer dans le débat de sa qualité (les mélomanes l’apprécient rarement), il s’invite dans le débat public pour ses potentiels dangers sur l’audition. Voici ce que l’on sait.
Compresser un son consiste à supprimer les écarts entre les sons faibles et les sons forts. À la base, un son compressé est donc un son modifié électroniquement afin d'être mieux entendu. Les musiciens les connaissent ainsi bien puisqu'ils utilisent régulièrement des compresseurs en studio comme sur scène afin de s'assurer que chaque partie d'un morceau de musique sera bien entendu par l'audience.
Pour le grand public, la notion est un peu plus abstraite et les sons compressés sont bien souvent impossibles à distinguer à l'oreille des sons non-compressés. Pourtant, ils sont partout ! C’est par exemple grâce à la compression que l’on peut écouter de la musique sans problème en voiture puisqu’elle couvre alors la plupart des sons environnant. C'est également la (sur)-compression du son qui fait que les publicités au milieu d'un programme radio ou télé ont souvent l'air plus fortes que le programme en lui-même. En pratique, il est bien souvent seulement beaucoup plus compressé. Tous les sons sont au même niveau (à fond) et le volume paraît plus élevé. Cette sensation est due à l'absence de périodes de repos pour l'oreille qui se sent agressée.
On retrouve des sons compressés un peu partout dans notre vie quotidienne.
Nous sommes donc quasiment toutes et tous exposés de longues heures par jour à des sons compressés. Mais est-ce réellement un problème ?
La compression du son n'a rien de nouveau puisqu'elle s'est répandue dans les années 1960. On l'entend donc depuis tout petit à la radio ou à la télévision. Si le son compressé était si dangereux, on s'en serait certainement rendu compte, non ? Pas forcément parce qu'un élément de taille à changé : sa quantité. Si nos parents en entendaient une heure par ici, une heure par là durant leur enfance, nous y sommes désormais exposés quasi-continuellement. L'expansion des vidéoconférences et autres rendez-vous téléphoniques a d'ailleurs directement contribué à cela.
Résultat, nos oreilles n'ont plus de répit. Elles sont continuellement sollicitées et ne parviennent pas à récupérer correctement. Contrairement à nos yeux, protégés par les paupières, elles ne disposent en effet d'aucun dispositif de fermeture qui permettrait à l'ensemble du système auditif de récupérer.
La bonne nouvelle est que les sons compressés ne semblent pas entraîner de perte d’audition. Le fait que nous soyons quotidiennement entourés de ces sons modifiés électroniquement ne risque donc pas, d’après ce que les scientifiques ont pu constater, de nous faire moins bien entendre à moyen ou long terme. Ou en tout cas pas directement.
Le manque de temps de silence représente en effet un risque de fatigue auditive bien réel.
On parle de fatigue auditive en cas d’exposition au bruit trop longue ou trop intense. Elle se manifeste par une perte d’audition temporaire, parfois accompagnée de bourdonnements d’oreille ou de la sensation d’avoir les oreilles bouchées. Elle encourage également la personne qui en souffre à hausser la voix. Heureusement, ces symptômes disparaissent une fois les oreilles reposées.
Le problème de la fatigue auditive est qu’elle entraîne une diminution des réflexes auditifs. Les petits muscles qui se contractent en cas de volume sonore élevé afin de protéger l'appareil auditif récupèrent moins rapidement et ne font plus correctement leur travail. Conséquence directe, l'appareil auditif est moins bien protégé, la fatigue auditive s'aggrave et le circuit neuronal auditif encourt un risque direct. À long terme, elle peut donc entraîner une perte d’audition irréversible. Il n’est néanmoins, à ce jour, pas prouvé que le son compressé puisse être considéré responsable.
Lorsque les oreilles sont fatiguées, le bruit devient gênant, ce qui entraîne un risque d’hyperacousie, une plus grande sensibilité aux sons. Il semble également probable que l'omniprésence du son compressé augmente le risque de développer des acouphènes. La fatigue est d’ailleurs, de manière générale, un facteur aggravant dans leur déclenchement et leur ressenti.
D'autres lésions du système auditif pourraient également être favorisées par une exposition prolongée au son compressé. Les recherches scientifiques sont néanmoins encore trop peu nombreuses sur le sujet et il reste à déterminer leur influence exacte sur la santé auditive.
Pour protéger nos oreilles, il est important de leur accorder du repos. C’est vrai pour la musique compressée, mais aussi pour toutes les autres sources sonores. Il est donc important, quels que soient sa profession et ses centres d’intérêt, de s’aménager des périodes régulières et assez longues de silence.
Il n’est évidemment pas toujours possible d’éviter les sons compressés. Dans ce cas, baisser le son de son casque ou de ses enceintes est un bon réflexe à avoir. Lorsque la fatigue auditive s’installe, il peut également être utile de réapprendre à écouter des sons naturels (non-compressés ou moins compressés), par exemple en pratiquant le chant ou un instrument acoustique.
En cas de doute sur sa santé auditive, il est de plus essentiel de consulter un professionnel de santé (médecin ORL notamment) qui est à même de diagnostiquer et de prendre en charge tout éventuel problème d’audition.